Que reste t’il du « contrat nouvel embauche » ?
- 22 avril 2015
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- Posted by jpvcom
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Mesure phare des ordonnances Villepin du 2 août 2005 le système du contrat « nouvelles embauches » paraît simple : le contrat qui doit être à durée indéterminée est réservé aux entreprises de moins de 20 salariés (96% des entreprises employant 29% des salariés du secteur privé sont susceptibles d’en bénéficier) et prévoit des modalités simplifiées de rupture pendant les 2 premières années (une simple lettre recommandée non motivée suffit). Après ces deux années, le contrat est soumis au régime de droit commun du contrat à durée indéterminée avec obligation de respecter la procédure de licenciement et de motiver la rupture du contrat. Afin de contrebalancer ces faibles garanties, le salarié se voit reconnaître des droits spécifiques (préavis de deux semaines pour les six premiers mois puis un mois ensuite, sauf faute grave ou force majeure, indemnité de fin de contrat égal à 8% de la rémunération versée au salarié, sauf faute grave de celui-ci, couverture d’assurance chômage renforcée, mise en place d’un accompagnement particulier). Ce dispositif paraît en outre attrayant pour les employeurs. Après tout il a été maintes fois démontré dans le passé, que les performances de la France en matière d’emploi étaient décevantes, comparées à celles des pays anglo saxons ou de l’Europe du Nord. Beaucoup de causes peuvent être avancées : la complexité des démarches, le poids des charges mais aussi la crainte d’avoir à justifier éventuellement devant un juge du motif du licenciement … Qui plus est, il est patent que « les petits entrepreneurs sont avant tout soucieux de simplicité, de prévisibilité et de sécurité juridique » (V.Rapport.Ass.Nat n° 2412. p33). A première vue et sur le papier, ce type de contrat semble correspondre aux légitimes aspirations des chefs de petites entreprises. Alors pourquoi un tel fiasco….. ?
Une des raisons peut être trouvée dans le manque de dialogue avec les partenaires sociaux. Une autre, dans la complexité du dispositif. En effet, on mentionnera que bizarrement, l’ordonnance du 2 août 2005 ne vise pas l’exclusion des dispositions de l’article L 122-41 du Code du travail relatives à la procédure disciplinaire. Ce qui revient à dire que si l’employeur entend licencier un salarié pour un motif disciplinaire (faute, manquement de l’intéressé…), il se devra de respecter la convocation à l’entretien préalable et l’envoi d’une lettre de licenciement motivée. Cette affirmation réduit pour le moins la portée du nouveau dispositif, la plupart des licenciements pour motif personnel étant prononcés pour un motif disciplinaire. Qui plus est, l’ordonnance laisse subsister : l’article L 122-45 (discrimination), les articles R 241-51-1 , L 122-24-4, L 122-32-5 (procédure en matière d’inaptitude), l’article L 120-40 et s.(procédure disciplinaire), l’article L 122-25 et s. (dispositions relatives aux femmes enceintes), les dispositions relatives aux procédures d’information et de consultation régissant les procédures de licenciements économiques collectifs…..Qui plus est, on sait que la justice européenne vient de censurer une disposition de non comptabilisation des jeunes de moins de 26 ans dans l’application des seuils sociaux…..Si on ajoute à cela la mort prématurée du grand frère « CPE », on se dit que décidément, nos gouvernants peuvent se comporter comme des grands et dangereux amateurs…..
François Taquet
Professeur de Droit Social, Conseiller scientifique du réseau GESICA